Une semaine s’achève, où l’actualité
aura une fois encore pris les formes qu’on lui connait : celle des
surprises ou de l’intolérable. Les deux d’ailleurs se rejoignant souvent sur le
fond.
N’est ce pas intolérable qu’en
Centrafrique, une jeune journaliste, Camille LEPAGE soit tuée dans des
circonstances non encore élucidées, alors qu’elle faisait son travail ? N’est
ce pas surprenant qu’un mois après l’enlèvement des lycéennes au Nord du
Nigéria, le Chef de l’Etat nigérian annule une visite dans cette région sous
prétexte de problèmes de sécurité ? Dans le fond, ces deux événements
tragiques viennent rappeler aux Africains, que 50 ans après les indépendances
ils n’ont pas d’Etat. Oui ! l’Etat, c’est la réalité suprême que se donne
sur terre une communauté pour gérer tous les aspects de sa vie : économique,
politique, social, sécuritaire, et… Pour
jouer ce rôle, il dispose du « monopole de la contrainte physique légitime »,
dixit Max Weber. Qu’ont-ils fait de ce monopole, les Etats africains ? Ils
s’en sont servis pour faire des coups d’Etat, s’installer aux commandes, s’enrichir
en intimidant, voire assassinant ceux qui osaient trop tôt leur dire qu’ils
avaient tort. En faisant ainsi, ils crucifiaient un dieu sans lui laisser la
possibilité de ressusciter.
Cela jusqu’au jour, où à l’intérieur
de leurs frontières, des gens qui en avaient marre ont dit que cela suffisait,
et qu’ils ne pouvaient plus se fier au pouvoir de l’Etat. Alors, ils se sont
dotés de ce qui faisait ce pouvoir de l’Etat : armée, collecte des impôts
ou si vous voulez de fonds par les prises d’otage et le chantage- avouez d’ailleurs
que les Etats qui se servent mal de leur pouvoir ne font que cela- et puis le
droit de déclarer la guerre, d’obliger le pouvoir de l’Etat à négocier, ce qui
est inconcevable pour un Etat digne de ce nom. Mais que de fois n’a-t-on pas vu
des pouvoirs d’Etat en Afrique négocier avec des rebellions, sans reconnaitre
qu’ils avaient échoué ? Certes, ils sont souvent servis par l’histoire,
qui les réhabilite en refermant plus tard le piège de l’autorité sur l’outrecuidance
de ces rebelles. Mais comme les rebelles apprennent aussi de ces postures
immorales de gens qui échouent sans rendre compte et reviennent aux affaires
par des combinaisons de toutes sortes, nous avons aujourd’hui des Boko Haram,
qui peuvent enlever 200 jeunes filles pendant plus d’un mois sans que le
pouvoir nigérian ou celui des technologies satellitaires ne puisse les
inquiéter.
Cette descente aux enfers
des pouvoirs africains est illustrée aujourd’hui par cet aveu de peur d’un Chef
de l’Etat devant les menaces d’un groupe armé, BOKO Haram. Que diraient et
feraient les pauvres paysans qui vivent au jour le jour sous le poids de leurs
menaces sans une armée qui puisse les protéger, comme en dispose le Chef de l’Etat ?
Et l’avenir promet pire, à
moins qu’en Afrique on ne finisse par apprendre que le pouvoir d’Etat est le
dieu d’une religion qu’on nomme politique et que comme tout dieu, il est d’abord
valeur, éthique avant d’être force ou
puissance.
A Paris, les Chefs d’Etat des pays frontaliers du Nigéria et celui du Nigéria, qui se sont retrouvés
autour du Président français François Hollande ont déclaré avoir mis au point
une stratégie globale régionale pour contrer les menaces terroristes. Est-ce suffisant
pour amener les pouvoirs d’Etat africains à ne plus renier leur vraie nature, qui est de bâtir des communautés nationales solidaires, heureuses, et non de servir des intérêts de clans?
D’ailleurs comme par hasard,
l’histoire semble se répéter du côté de l’Ukraine après que les Hommes d’Etat
qui ont vécu les atrocités des deux premières guerres mondiales aient quitté la
scène politique mondiale. Peut-être que l’Afrique n’est pas seule à devoir
redécouvrir la nécessité de faire coincider la politique plus avec des valeurs
qu’avec des kalachnikov.
Dy
Gilid
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