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samedi 30 mai 2009

TOGO: MISSION IMPOSSIBLE

http://www.togoforum.com/Presse/AgoraPress/comJustRecon052809.htm

http://www.republicoftogo.com/central.php?o=1&s=1061&d=3&i=3823

Ces deux liens vous introduisent dans l'univers d'une question d'actualité cruciale pour le Togo. Comme annoncé dans le précédent article, le Président togolais cherche à recoller les morceaux brisés de sa politique de réconciliation. Il vient d'installer la Commission chargée de piloter ce dossier.

Voilà le Togo parti pour explorer 51 ans de son histoire politique, car il faut remonter jusqu'à 1958. Voici le Togo confronté à ses pires démons; ceux qui minent sa conscience, ces maux dont il toujours nié l'existence ou l'importance, ces vérités, qui n'ont jamais été totalement ou même partiellement dites, et qui ne le seront probablement jamais. Comment un fils peut-il dire combien il souffre de ne pas savoir où a été enterré le corps de son père assassiné dans un camp? C'est d'abord raconter combien il a en face de lui des gens monstrueux, qu'il ne saurait approcher. Bref, c'est nier les réalités de l'histoire, qui nous a enseigné que le sang sèche vite et que si l'on refuse d'admettre cette vérité, on verse le sien et on fait verser celui de bien d'autres encore, pour qu'il ne sèche pas. La lucidité historique commande de ne pas dire ces vérités là n'importe comment.

C'est ensuite et surtout déserter l'école de la grande douleur, qui plus que tout autre maître ouvre aux hommes les portes des abîmes de l'âme humaine ou divine. Les grandes douleurs sont muettes, dit-on. Et c'est parce qu'elles sont muettes, qu'elles sont précieuses, qu'elles nous éclairent, qu'elles nous donnent la force de dire de ceux qui en sont responsables, qu'ils ne savent pas ce qu'ils font, c'est à dire de leur pardonner. Seules les grandes douleurs, celles qui nous ont ôté tout ce que vous avez, l'honneur, la dignité, ces valeurs dont les hommes se parent tant, seules ces douleurs là peuvent, dans notre faiblesse nous autoriser à approcher ceux qu'on croit être nos bourreaux, pour les amener petit à petit à prendre conscience de ce qu'ils font. La conscience d'une nécessité de la réconciliation est un peu la victoire de ceux qui ont été à cette école là. Ils devraient s'en réjouir, si l'affaire ne semblait pas déjà être une mission impossible.

En effet, le contexte électoral qui se plante progressivement fait qu'il n'est pas sage de remuer le couteau dans les plaies et de prendre le risque d'exacerber les passions dans les camps qui vont s'affronter dans l'arène des urnes. Surtout que ces camps ne sont pas forcément homogènes, disciplinés et contrôlés par leurs partis. Le problème de la réconciliation dans un tel contexte semble s'apparenter à l'ouverture des portes de la cité au désordre.

En tout cas, l'animateur , j'allais dire le Président de cette commission, Mgr BARRIGAH l'archevêque d'Atakpamé est bien conscient de ce risque, lui qui s'en remet à la grâce de Dieu. Dieu ayant toute l'éternité devant lui n'échoue jamais parce qu'il sait prendre son temps. La commission saura-t-elle prendre le sien? Peut-elle prendre le sien? Peut-elle refuser d'être l'otage d'un orage électoral qui la paralyserait et rendrait plus sceptiques encore les Togolais sur le dossier de la réconciliation pourtant nécessaire, mais à inscrire dans la durée.

Alexis Tocqueville nous apprend qu'en démocratie chaque génération est un nouveau peuple. Celle qui nous dirige aujourd'hui, qui gère la réconciliation a le tort de s'être rendue responsable de nouvelles tragédies qui renvoient la responsabilité de la réconciliation à une prochaine génération. Tout ce qu'on peut demander au mieux à l'actuelle génération, c'est de créer les conditions pour qu'à l'avenir les générations qui vont suivre ne rééditent pas les tragédies, qui ont fait tant de mal au Togo et qu'elles puissent réellement faire enfin la réconciliation véritable. A bon entendeur salut.

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