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dimanche 6 janvier 2008

Femmes , gloire et rançon

Sur mon site perso que je n'avais plus visité depuis un certain moment, j'ai découvert ces derniers temps qu'un visiteur me demandait de parler des coutumes de mon ethnie. Vaste programme. Comme il s'agit d'une femme, je vais commencer à examiner le problème de l'émancipation de la femme par rapport aux traditions moba, le groupe ethnique dont je suis issu.
En Afrique, de leur vivant les hommes sont très respectés quand ils atteignent un certain âge, quand l’ âge et l'expérience leur ont permis de mûrir. La photo jointe à ce texte témoigne de ce respect. Pour les femmes, les hommes n'affichent pas un si grand respect sauf s'il s'agit d'une mère, grand mère ou belle mère. Certains pensent en observant cette tendance qu'il s'agit du refus de considérer les femmes comme les égales des hommes. La vérité est qu'en Afrique, les femmes sont toujours sur un trône inaccessible à l'homme. Un dicton de chez nous dit qu'on n'initie pas la femme au savoir, à la magie ou à la sorcellerie, parce qu'elle est le savoir, elle est la magie, elle est la sorcellerie. Ainsi, quand dans nos villages, on refuse de scolariser les jeunes filles, c'est parce que profondément enfouie dans la conscience collective, il y a cette conviction que la femme n'a pas à apprendre, mais qu'elle est ce qu'il faut apprendre dans la vie.Et de fait toute la tradition en pays moba repose sur la femme.Parce qu'elle est le savoir, la pérennité, c'est son souvenir qui est pérennisé dans les rites des ancêtres. On ne se souvient de chaque homme , quelle qu 'ait été sa grandeur, que dans la mesure où on se souvient de sa mère. Le fétiche principal sur plusieurs générations porte le nom de la femme et si elle a eu un brillant fils, on rappelle qu'elle fut la mère de ce dernier. Exit l'homme. Mais de quels droits de la femme parle-t-on quand on s'adresse à ces cultures ?Certes, quand on partage des terres on n'en réserve pas aux femmes. Mais pourquoi faire, puisqu'elles sont reines et qu'elles doivent être servies par leurs époux et leurs fils. Même quand on les obligeait à se marier , souvent c'était pour l'équilibre de la société qu'on le faisait. A ce propos, voici une anecdote. Un puissant ministre , quand il a été décidé dans un pays africain de bannir les mariages forcés, fut envoyé pour expliquer aux paysans au nom du gouvernement le bien fondé de cette démarche. Il s'acquitta bien de sa mission mais celà ne plut pas aux dépositaires des traditions. Il se fit rappeler à l'ordre par un vieillard. Ce dernier lui rappela que son grand père à lui le ministre était lépreux et que si l'on n'avait pas obligé une femme à devenir sa grand mère, il ne serait pas aujourd'hui devant eux en tant que ministre, parce que son grand père n'aurait trouvé aucune femme. Voilà le bien fondé des mariages forcés. Qu'il n'y ait pas d'homme sans femme quelque soit son handicap. Il est vrai aussi qu'il y a un problème pour les femmes stériles, qui n'ont pas d'enfants parce qu'elles ne connaîtront pas cette gloire sur des générations. Mais la sagesse traditionnelle y a pourvu, puisqu'un autel spécial est dressé dans les familles pour ceux qui n'ont pas eu d'enfants et qu'à l'occasion des grandes difficultés seulement , on peut invoquer avec plus de respect qu'on ne le fait pour les ancêtres qu'on invoque en tant que descendant direct. Cet autel est considéré comme l'autel de morts qui sont avec les grand ancêtres, plus proches de Dieu et qu'il ne faut pas déranger ou solliciter pour un oui ou un non.Ainsi donc dans les traditions, le problème de l'émancipation de la femme ne se posait pas. Elle était faite pour la gloire sur plusieurs générations. Mais elle payait à travers certaines contraintes la rançon d'une telle gloire. Les traditions doivent évoluer. Mais il faut bien comprendre le rôle qu'elles jouent pour savoir comment les faire évoluer. La problématique de l'émancipation de la femme aujourd'hui c'est de savoir si la femme même présidente équivaut à la femme de la tradition africaine qui était le savoir, ce que chaque homme apprenait à maîtriser dans les initiations . Cette problématique comporte une deuxième dimension: peut-on former la femme pour qu'elle puisse donner volontairement une descendance au lépreux, à un handicapé ? Ou bien faut-il tout simplement fermer les yeux sur le handicap des hommes et ne pas penser à leur donner la possibilité d’aimer et de se faire aimer ? A moins que derrière le problème de l'émancipation de la femme il n'y ait une lutte qui ne dit pas son nom, celle de limiter les naissances, de contrôler la démographie du monde avec tous les risques de déstabilisation qu'elle comporte, la problématique de l’émancipation de la femme appelle une réflexion plus approfondie que l’accès aux postes de responsabilité.

mercredi 2 janvier 2008

Triste début du monde

Pendant que l'espoir collectif légitime en ce début d'année rendait la perspective d'un monde meilleur possible, et que les hommes , les femmes et les enfants dans une parfaite communion oubliaient les problèmes du monde, la misère et la pauvreté qui le déstabilisent, au Kenya l'horreur nous rappelait la triste réalité de notre bonne vieille terre.
L'horreur, c'était déjà la manipulation des résultats de l'élection présidentielle kényane pour faire gagner le président sortant Kibaki contre M. Odinga le candidat de l'opposition qui au 3/4 du dépouillement des résultats venait largement en tête. L'horreur, c'était déjà aussi la répression policière de la légime manifestation des partisans de M. odinga, dont les manipulations ont empêché la victoire. L'horreur, c'était encore l'indifférence voire la complicité de la communauté internationale qui a laissé faire M. kibaki. L'horreur, c'est la macabre arithmétique qui se poursuit à chaque bulletin d'information: 150, 224, 359 morts... Mais l'horreur c'était surtout cette mort affreuse qui a frappé des enfants et des femmes dans une église, oui dans une église, le jour du Nouvel An. La macabre arithmétique parle de 35 personnes brûlées vives dans cette Eglise. Comme si en chaque enfant il n'y avait pas chacun de nous. C'est notre humanité entière qui fut frappée hier. Et nous ne sentîmes pas de douleur parce que l'espoir d'un monde meilleur habitait nos coeurs et qu'il nous anesthésiait. Le réveil est d'autant plus douloureux pour nous que nous devons avoir honte de ne pas avoir senti les flammes lécher nos corps. Mais le comble de l'horreur aura été cet empressement avec lequel M. Kibaki a prêté serment. N'est ce pas scandaleux que la mort de ces enfants qui de surcroit sont de son ethnie et et sont morts à cause de lui n'aient trouvé que l'écho du pouvoir dans son coeur? Pouvoir, pouvoir, quand tu nous tiens, c'est toujours triste, même un jour de nouvel an.