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vendredi 2 août 2013

Législatives togolaises: la victoire de la discipline


L’essentiel était en gestation dans mon pays le Togo, alors qu’ailleurs il est déjà fleurs ou fruits sous d’autres cieux. Au lieu d’apprécier les parfums de ces fleurs ou les saveurs de ces fruits, j’ai préféré écouter le silence de cette gestation de l’essentiel au Togo. Son message à l’issue des élections législatives du 25 Juillet 2013, je me fais le plaisir de vous le livrer.

Les élections législatives de 2013 ont livré leurs résultats :

- 62 députés pour l’UNIR (Union pour la République) parti au pouvoir ;

- 19 députés pour le Collectif Sauvons le Togo (CST) ;

- 6 députés pour la Coalition Arc-en-ciel ;

- 3 députés pour l’UFC ;

- 1 député indépendant.

Même provisoires, ces résultats traduisent la configuration quasi définitive de la nouvelle assemblée, d’autant plus que le CST a renoncé à recourir à la Cour Constitutionnelle pour d’éventuelles plaintes.

Il doit être en train de se mordre les doigts. Monsieur Jean Pierre Fabre, qui en 2007 était le chef d’un groupe de 27 députés de l’UFC et qui se retrouve aujourd’hui à la tête de seulement 19 députés.

LE PARALLELISME DES FORMES

L’UFC comme le RPT ont vécu des crises internes graves : Monsieur Kpatcha GNASSINGBE, un baron de RPT se trouve sous les verrous avec plusieurs responsables militaires et civils pour avoir cherché à renverser le régime en place.

Ses amis du parti sont restés tranquilles. Pourquoi ? La discipline ?

Un autre homme fort du système RPT, Monsieur Pascal BODJONA est sorti de prison il n’y a pas longtemps. Doit-on oublier le Commandant Akila Esso BOKO, ministre de l’intérieur en 2005, qui a claqué la porte parce qu’il ne voulait pas cautionner des massacres programmés dans la foulée des élections présidentielle de 2005 ? Ces massacres ont pourtant été exécutés faisant des centaines de morts. Il est parti mais tout le RPT l’a désavoué ; Pourquoi ? La discipline ?

Et cerise sur le gâteau, à une encablure des élections législatives de 2013, le RPT a décidé de se dissoudre pour que naisse un nouveau parti, l’UNIR. Il y a eu des mécontents, mais l’UNIR, héritière du RPT est née, et en moins de 18 mois a réussi ce que le RPT ne réussissait plus : Gagner plus des 2/3 des députés ; Pourquoi ? La discipline avec en plus un travail remarquable sur le terrain pour faire connaître le nouveau parti.

De l’autre coté, l’opposition a connu ses crises : d’abord le ratage De l’élection présidentielle de 2005, où un bloc uni autour de Bob Akitani n’a pas su obtenir l’alternance.

En 2010, elle n’a pas su se mobiliser contre Monsieur Faure GNASSINGBE, qui après cinq ans au pouvoir s’était forcément consolidé et ne devait être affronté que par une opposition plus que jamais unie et déterminée.

Pourquoi n’en fut-il pas ainsi ? L’indiscipline dans ce camp.

A l’UFC, principal parti de cette opposition, la crise atteignit son paroxysme au point que Monsieur Jean Pierre Fabre, candidat à la présidentielle de 2010 claqua la porte et créa son parti en entrainant dans son sillage les meilleurs cadres et une grande partie de l’électorat. Pourquoi en fut-il ainsi ? L’indiscipline ? Que coûtait-il à Monsieur Jean Pierre Fabre d’attendre que son heure vienne dans cinq, dix, quinze ans pour prendre l’appareil du parti et en faire ce qu’il veut au lieu de laisser un tel scandale éclate ? On parle toujours du vent de l’Est, de la pérestroïka en oubliant que son artisan, Mikael GORBATCHEV serait mort, s’il n’avait pas su attendre son heure, en supportant tout ce que le géant parti communiste d’Union Soviétique avait de contraire et de différent avec l’idéal de sa pérestroïka.

Pourquoi Monsieur Fabre ne pouvait-il pas attendre comme Monsieur GORBATCHEV ? L’indiscipline.

L’héritage du parti unique

Eyadema disait aux animateurs excités: RPT avant tout, ceux ci répondaient, discipline.

Oui ! La discipline fut la principale valeur de ce parti bâti presque comme une armée. L’UNIR en a hérité. L’opposition, même dans ses velléités les plus hardis pour obtenir l’alternance n’a jamais su être disciplinée. Il n’y a qu’à voir comment à quelques heures de la clôture des dépôts de candidatures, la coalition Arc-en-ciel et le Collectif Sauvons le Togo faisaient croire qu’ils pouvaient encore déposer des candidatures communes.

Je préfère l’injustice au désordre, disait Goethe. Le peuple togolais est comme lui. Il sait que c’est profondément injuste de laisser encore l’UNIR au pouvoir, alors que toute sa raison et sa foi le convient à l’alternance. Mais il a peur du désordre qu’une opposition aussi indisciplinée et championne de l’improvisation pourrait causer.

Il renvoie l’opposition aux leçons de cette histoire pour mieux se préparer, mieux s’organiser pour mériter sa confiance.

En clair, pour que l’opposition soit prête, il lui faut faire sienne une partie de l’héritage du RPT, en l’occurrence la discipline. Nul ne lui demande d’être une armée, avec en plus le Sabre.

Non ! On lui demande tout simplement en étant discipliné, d’être le temple de l’esprit, qui selon Napoléon Bonaparte, un grand connaisseur en matière de rapports entre la force et le droit, c’est – à dire le sabre et l’esprit disait qu’a la longue l’esprit finit toujours par l’emporter sur le sabre. Il le disait à son ami Fontanes. Je le crois et je le dis aussi à mes amis de l’opposition togolaise, avec lesquels je me sens plus de solidarité comme le disait Albert Camus, parce qu’ils sont vaincus une fois encore. Les vainqueurs ou pour parler comme Camus « les saints » ne doivent pas oublier que les vaincus restent des togolais à part entière et que le chantier de la construction nationale ne devrait exclure personne à quelque niveau de responsabilités que ce soit. Telle est la magie de l’alternance.

Et c’est parce que je me sens togolais, convaincu de la nécessité de l’alternance, que je ma dois de préciser ceci : l’esprit de l’alternance n’a rien à voir avec les invectives, les menaces, la surenchère. C’est un esprit doux et paisible qui souffle dans le travail discret qu’on fait, dans la reconnaissance de la valeur de l’autre et non dans la recherche opiniâtre de ses faiblesses, dans la connaissance de soi, dans le courage qu’on a de reconnaître ses propres faiblesses et surtout dans l’intelligence et l’effort qu’on met à faire de ses faiblesses des atouts. C’est le difficile pari que l’opposition togolaise se doit de gagner pour que vienne le changement.

A bon entendeur, salut !

Yempabou DJAGBA